Hogan Lovells 2024 Election Impact and Congressional Outlook Report
L’équipe Financement de Projet du bureau de Paris vous propose de retrouver l’actualité récente française et européenne concernant le droit des contrats publics et le droit de la commande publique, notamment dans le domaine des infrastructures. Vous bénéficiez d’une sélection ainsi que d’une analyse de la jurisprudence des deux dernières semaines.
Par une décision du 30 juillet 2024, le Conseil d’Etat a été amené à préciser son office à l’égard d’une sentence arbitrale rendue en France dans un litige né de l'exécution ou de la rupture d'un contrat administratif relevant uniquement du droit français, sans élément d'extranéité.
Après s'être déclaré « compétent pour connaître des recours dirigés contre une telle sentence arbitrale, en application de l'article L. 321-2 du code de justice administrative », le Conseil d’Etat précise les contours de ce recours, d'une manière similaire à la position définie à propos des sentences arbitrales internationales (CE, Ass., 9 novembre 2016, Sté Fosmax, n°388806).
Ainsi, il détermine les moyens invocables devant lui en énonçant que « ne peuvent en outre être utilement soulevés devant lui que des moyens tirés, d'une part, de ce que la sentence a été rendue dans des conditions irrégulières et, d'autre part, de ce qu'elle est contraire à l'ordre public ». A ce titre, il précise d’une part, qu’une sentence ne peut être regardée rendue « dans des conditions irrégulières que si le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent, s'il a été irrégulièrement composé, notamment au regard des principes d'indépendance et d'impartialité, s'il n'a pas statué conformément à la mission qui lui avait été confiée, s'il a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure ou s'il n'a pas motivé sa sentence » et, d’autre part, qu’une sentence est « contraire à l'ordre public lorsqu'elle fait application d'un contrat dont l'objet est illicite ou entaché d'un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, lorsqu'elle méconnaît des règles auxquelles les personnes publiques ne peuvent déroger, telles que notamment l'interdiction de consentir des libéralités, d'aliéner le domaine public ou de renoncer aux prérogatives dont ces personnes disposent dans l'intérêt général au cours de l'exécution du contrat, ou lorsqu'elle méconnaît les règles d'ordre public du droit de l'Union européenne. ».
CE du 30 juillet 2024, n° 485583
Le Conseil d’Etat rappelle, d’une part, que l’article L.2181-1 du code de la commande publique prévoit que « dès qu'il a fait son choix, l'acheteur le communique aux candidats et aux soumissionnaires dont la candidature ou l'offre n'a pas été retenue, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. » et, d’autre part, que l’article R.2181-1 du même code dispose que « l’acheteur notifie sans délai à chaque candidat ou soumissionnaire concerné sa décision de rejeter sa candidature ou son offre ».
Cependant, la plus haute juridiction administrative juge qu’il ne résulte ni de ces dispositions, ni de la finalité de cette communication (qui est notamment de permettre au candidat évincé de contester son éviction devant le juge du référé précontractuel) que « le délai écoulé entre la décision d'attribution du marché et l'information d'un candidat évincé du rejet de son offre serait susceptible, à lui seul, de constituer un manquement de l'acheteur à ses obligations de transparence et de mise en concurrence. »
CE du 27 septembre 2024, n° 490697
Alors qu’un président délégué de la commission prévue à l’article L.1411-5 du code général des collectivités territoriales avait déclaré, pendant la passation du contrat, que « ce marché est mal géré. C'est dommage car il est très fréquenté. Et les incivilités font fuir les clients du centre-ville. Le bail de concessionnaire du marché doit être renouvelé en janvier prochain, c'est l'occasion de le réformer pour qu'il soit plus diversifié et qu'on y trouve plus de commerces de qualité ». Le Conseil d’Etat juge que « la modération des propos et le contexte de cette publication ne révélant ni parti pris ni animosité personnelle à l'encontre du délégataire sortant, ce commentaire ne constitue pas une atteinte à l'impartialité de l'autorité concédante. »
CE du 24 juillet 2024, n° 491268
Le Conseil d’Etat a jugé que la décision par laquelle un juge enjoint à une partie de communiquer des documents à un expert est susceptible de recours. En effet, il estime que « la décision par laquelle le président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel, ou le magistrat chargé du suivi des opérations d'expertise qu'il désigne, enjoint à une partie, le cas échéant sous astreinte, de remettre à l'expert les documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission présente, compte tenu de son objet et de ses effets, un caractère juridictionnel". Dans ce cadre, le Conseil d’Etat précise que la contestation se fait par voie d’appel ou de cassation selon que la décision a été prise par le juge des référés du tribunal administratif ou celui de la cour administrative d’appel. Dans le cas particulier où la décision a été prise par un jugement ou un arrêt avant dire droit la contestation se fait également soit en appel ou en cassation, selon le cas.
CE du 30 juillet 2024, n° 491172
Le Conseil d’Etat a jugé que « l'acheteur n'est pas tenu de suivre l'avis émis par le jury du concours et qu'il peut, notamment, porter son choix sur un candidat ayant participé au concours autre que celui classé premier par le jury », dans un tel cas le juge administratif réalise un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation.
CE du 30 juillet 2024, n° 470756
Dans le cadre d'une réponse à une question préjudicielle, la CJUE juge, que la lecture combinée des stipulations des directives marchés publics relatives à l'appréciation des candidatures avec le principe de proportionnalité s’oppose à « une réglementation nationale excluant la possibilité, pour des membres originaires d’un groupement temporaire d’entreprises soumissionnaire, de se retirer de ce groupement, lorsque le délai de validité de l’offre présentée par ledit groupement vient à échéance et que le pouvoir adjudicateur sollicite la prorogation de la validité des offres qui lui ont été soumises, pour autant qu’il soit établi, d’une part, que les membres restants du même groupement satisfont aux exigences définies par le pouvoir adjudicateur et, d’autre part, que la continuation de leur participation à la procédure de passation en question n’entraîne pas une détérioration de la situation concurrentielle des autres soumissionnaires. ».
CJUE du 26 septembre 2024, n° C-403/23 et C-404/23
Dans le cadre d'une affaire dans laquelle le juge administratif avait été saisi par les juridictions judiciaires d’une question préjudicielle relative à l’appréciation de la légalité d’une clause de règlement des litiges renvoyant notamment à la nomination d'un expert par le tribunal administratif prévue dans une convention d'affermage relevant du juge judiciaire en application d'une loi spéciale, le Conseil d'État juge en premier lieu que les stipulations de ladite clause « prévoyant l'obligation pour les parties de saisir le président du tribunal administratif d'une demande tendant à la désignation d'un " expert " étaient illégales dans la mesure où elles conduisaient à l'engagement, par le juge administratif, d'une mission de conciliation en-dehors des domaines de compétence de la juridiction administrative. »
En outre, le Conseil d'État juge que "il n'appartient pas au juge administratif, saisi à titre préjudiciel par le juge judiciaire de la légalité de stipulations d'un contrat, de se prononcer sur les effets de la déclaration d'illégalité qu'il prononce". A ce titre, il confirme la décision du juge administratif qui avait considéré que "l'exigence de loyauté des relations contractuelles ne faisait pas obstacle à la déclaration d'illégalité de l'article 38 de la convention" et s'était abstenu de moduler dans le temps les effets de la déclaration d'illégalité de ces stipulations.
CE du 27 septembre 2024, n° 492140
Ecrit par Perrine Limousin.